Les mots qui soignent

Coeur brisé

Il y a d’abord les mots que j’écris. Ceux-là m’aident à m’exprimer sur ce que je ressens au plus profond de moi. J’aime prendre le temps d’écrire et de choisir les mots les plus justes pour refléter les émotions que je souhaite partager ici et que je cherche souvent à retrouver en me relisant quelques jours ou quelques semaines plus tard. Pour me souvenir. Pour prendre conscience du chemin parcouru. Aussi et surtout pour pouvoir dire haut et fort qu’il est possible de se reconstruire après un deuil périnatal malgré un cœur à jamais meurtri. 

Il y a ensuite les mots que je lis, dans des livres, dans des témoignages sur le forum de l’Association Petite Emilie, sur des pages Facebook ou encore sur des blogs comme Si Mon Histoire était Contée, Notre Famille Etoilée ou L’étoile Léo créés en hommage à des bébés disparus mais bien vivants dans la mémoire et le cœur de leurs parents. Les mots aussi que m’écrivent des personnes de mon entourage, certaines avec lesquelles je n’avais plus de contact depuis pas mal de temps mais auxquelles il m’arrivait encore de penser par moment car j’ai de chouettes souvenirs avec chacune d’elle. Je pense notamment à ma copine de fac Clémentine, à ma Belge préférée Frédérique et à ma rebelle bretonne et suisse d’adoption Aurore qui n’ont pas hésité à me contacter en lisant mon histoire.

Et puis il y a les mots qu’on me dit. Certains sont d’une telle sincérité, d’une telle douceur et empreints de tellement d’empathie et d’humanité que je ne pourrai jamais les oublier. Je pense notamment à tous les professionnels que j’ai rencontrés et qui ont su trouver des mots qui m’ont fait du bien et qui sont à jamais ancrés en moi.

Merci au médecin qui nous a annoncé que le cœur d’Alice s’était arrêté de battre de m’avoir très clairement dit, les yeux dans les yeux, que ce n’était pas de ma faute. Je crois, ou plutôt je suis sûre, que ses paroles m’ont permis de ne pas me laisser envahir par un sentiment de culpabilité destructeur. Merci à la sage-femme qui m’a accouchée pour la douceur de ses mots. Je ne me souviens pas de ses paroles exactes mais je garde un souvenir très précis de la bienveillance et de la douceur dont elle faisait preuve lorsqu’elle s’adressait à moi. Merci à la sage-femme responsable du service de maternité qui m’a dit qu’Alice était passée d’un paradis à un autre.

Merci à la psychanalyste qui m’a dit que j’avais été une mère assez attentive pour sentir que quelque chose n’allait pas et que je n’aurais rien pu faire de plus pour Alice car je ne suis malheureusement pas toute-puissante. Merci à elle de m’avoir aidée à réaliser que je devais donner sa juste place à Alice afin que je ne délaisse pas Noémie qui, elle, est bien vivante et a besoin de moi.

Merci à l’infirmière qui m’a récemment fait une prise de sang et à qui, les yeux embués et le cœur lourd, j’ai expliqué ce qui m’était arrivé. Merci à elle pour la sincérité de notre échange et pour la confiance qui s’est installée entre nous l’espace de quelques minutes.

Merci aussi à tous mes proches et amis pour toutes les paroles réconfortantes qu’ils ont eues à mon égard. Merci à ceux d’entre eux qui parlent d’Alice simplement, qui n’ont pas peur de prononcer son doux prénom et qui reconnaissent ainsi son existence et lui donnent sa place dans la leur.

Merci enfin à ceux à qui les mots ont fait défaut mais qui, par un regard, un geste ou quelques larmes versées, m’ont apporté énormément de réconfort.

Je terminerai avec les mots de Noémie qui, en me voyant pleurer un des premiers matins après notre retour de la maternité, m’a dit du haut de ces 4 ans et en posant sa petite main sur ma joue : « Arrête de pleurer, maman, ça va aller. » Et elle avait raison, car aujourd’hui, cinq mois après, ça va.

 

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